Retour aux thèmes de l'Agenda des Frontières 2020
La réunion des chefs d’État de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la lutte contre le terrorisme, s’est tenue le 16 septembre 2019 à Ouagadougou au Burkina Faso. Ce sommet, axé sur la Sécurité s’est terminé par un appel à plus de soutien de la Communauté internationale et à un engagement de mobilisation d’un (1) milliard de dollars américain pour contrer le terrorisme.
À Ouagadougou, les chefs d’État de la CEDEAO ont condamné les attaques terroristes et les violences intercommunautaires dans la région. Ils sont tous unanimes ; la déstabilisation de la Libye est la conséquence de ces nombreuses attaques terroristes. Il a été évoqué au cours du sommet, les ʺ 2200 attaques ces quatre dernières années, les 11 500 morts, les milliers de blessés, les millions de déplacés, une activité économique considérablement affectée et des conflits intercommunautaires exacerbés au Sahelʺ. Et la Communauté internationale y est pour quelque chose comme l’a souligné Mohamadou ISSOUFOU, Président de la République du Niger, par ailleurs Président en exercice de la CEDEAO : ʺla Communauté internationale a des devoirs vis-à-vis du Sahel, la Communauté internationale ne doit pas détourner ses regards du Sahel. C’est la Communauté internationale qui est la base de la crise libyenne, dont nous subissons les conséquences aussi bien dans le Sahel que dans le Bassin du lac Tchad. Quand cette crise libyenne a été déclenchée en 2011, nous étions contre et on ne nous a pas écoutés et on n’a pas pris des mesures nécessaires pour assurer, comme on l’a souvent dit, le service après-vente à la Libyeʺ.
La conférence a décidé d’adopter un plan d’actions prioritaire sur la période 2020-2024 ; et les chefs d’État ont décidé ainsi de mobiliser un (1) milliard de dollars américain pour faire face au terrorisme. Cet argent, selon eux, sera utilisé en fonction des priorités. C’est pourquoi, le Président burkinabè Roch Marc Christian KABORE aussi Président en exercice du G5 Sahel a déclaré que ces fonds concernent les questions de formation, d’équipements et tout ce qui concerne l’organisation et la mutualisation des renseignements et autres…La collecte de ces fonds se fera en même temps sur les huit (8) axes qui ont été dégagés par la CEDEAO et le financement sera adapté à certains de ces axes. Il a souligné que "les menaces transcendent les frontières". "Nous sommes tous exposés et aucun pays n’est à l’abri", "l’escalade de la violence a déclenché une crise humanitaire sans précédent", "des écoles et infrastructures de santé (ont été) et des symboles de l'État détruits".
Voici un extrait des décisions du communiqué final ayant sanctionné le sommet de Ouagadougou dans le domaine du renforcement de la gestion et du contrôle sécuritaire aux frontières terrestres, aériennes, maritimes et fluviales :
- les États membres s’engagent à former et équiper les administrations nationales impliquées dans la gestion et le contrôle des frontières, ainsi qu’à planifier et conduire des patrouilles et des opérations transfrontalières conjointes le long des frontières sensibles, avec l’appui du Programme frontière de l’Union africaine ;
- les États membres sont exhortés à produire et utiliser la carte d’identité biométrique de la CEDEAO afin de concilier le principe de libre circulation des personnes et des biens avec les impératifs de sécurité ;
- les États sont encouragés à soutenir le développement et/ou le retour des services de base dans les zones frontalières, à travers les instruments existants de la CEDEAO ou en cours de préparation tels que notamment le Fonds régional de stabilisation ;
- les États sont encouragés à adopter un cadre juridique pertinent devant faciliter le droit de poursuite ainsi que de l’entraide judiciaire dans le cadre des opérations de lutte contre le terrorisme.
D’ores et déjà, le Bénin a entrepris, depuis 2012, à travers l’Agence béninoise de Gestion intégrée des Espaces frontaliers, la mise en œuvre de la Politique nationale de Développement des Espaces frontaliers. Ceci a permis de mettre l’accent sur la construction d’infrastructures socio communautaires et de sécurité dans les espaces frontaliers, d’améliorer les conditions de vie des populations et de promouvoir des actions de Coopération transfrontalière par la signature des accords-cadres de coopération transfrontalière. Toutefois, beaucoup reste à faire pour satisfaire les populations frontalières et développement en eux, le sentiment d’appartenance à la Nation.
Dans le domaine de la promotion de la communication, du dialogue intercommunautaire et la prévention de l’extrémisme violent :
- les États membres s’engagent à promouvoir le dialogue intercommunautaire et la communication comme des outils de prévention des conflits et du terrorisme en facilitant la cohésion entre les communautés et en renforçant les mécanismes traditionnels de prévention et de résolution des conflits ;
- les Etats membres sont exhortés à mettre en œuvre effectivement le Protocole de la CEDEAO sur la Transhumance afin de promouvoir une transhumance apaisée, et le cas échéant, résoudre par le dialogue, les conflits entre agriculteurs et éleveurs ;
- les États membres ont été exhortés à impliquer fortement les leaders religieux et communautaires, les femmes, les jeunes, les chercheurs et autres groupes concernés de la société civile dans l’élaboration et la mise en œuvre de programmes pertinents de réconciliation, de lutte contre l’analphabétisme et de promotion de l’éducation à la paix et les encourage à définir des cadres pour une pratique religieuse emprunte de tolérance, de modération et de promotion de la culture de la paix ;
- les États membres s’engagent à poursuivre la création des infrastructures socio-éducatives et à mettre en œuvre de programmes de développement, notamment dans les zones affectées par les attaques terroristes, à créer des structures de formation professionnelle et à financer des projets à impact rapide et des programmes d’activités créateurs d’emplois.
La diplomatie préventive locale mise en œuvre par l’Agence béninoise de Gestion intégrée des Espaces frontaliers est une démarche pacifique en faveur de la démocratie, de la coopération transfrontalière d’initiative locale et du développement local dont l’objet est d’éviter que des différends locaux, nationaux ou inter-étatiques n’entravent les dynamiques de développement et de coprospérité des localités ayant en partage un espace transfrontalier. Le renforcement de cette démarche contribuera à promouvoir la sécurité. L’appui au développement des activités génératrices de revenu au profit des groupements de femmes vivant dans les espaces frontaliers participe de la paix et de la gestion des conflits. Le rôle des femmes est un autre élément considéré comme déterminant dans le contexte du processus de dialogue.
La mutualisation des efforts, le partage de renseignements, la dotation à la Mission intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation pour le Mali (MINUSMA), des mandats plus robustes lui permettant de lutter de manière plus efficace contre le terrorisme, l’entrée en guerre de la force en attente de la CEDEAO, au moins douze (12) mille hommes sont entre autres les décisions de ce sommet de Ouagadougou.
En définitive, tout ne doit pas se limiter au Sommet de Ouagadougou en ce qui concerne les questions de sécurité dans la région. Une chose est d’organiser les sommets mais une autre chose est de mener des actions fortes suite à ces sommets.
C’est pourquoi, les conclusions de ce sommet devraient faire actes d’actions, et ne doivent pas être des paroles à la ressemblance d’autres sommets où les conclusions sont rangées dans les tiroirs. Il y a une promesse de lever des fonds d’un milliard de dollars, mais ces fonds doivent contribuer à lutter contre la pauvreté et non à acheter des armes.
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